La corbillard et sa remise
L'objet de cette page semble bien modeste. C'est vrai, mais nous nous souviendrons lorsque nous étions enfant, de notre forte curiosité envers ce triste char mortuaire et son abri dans un quelconque hangar communal parfois au coin du cimetière : ainsi à Pioussay, à Villefagnan, à Aubigné. Le corbillard est un char d'usage récent, du moins pour ce qui concerne les roturiers.
Par ailleurs, une grande partie des habitants de Pioussay a bénéficié de ce char pour faire un dernier voyage, voyage sans retour. Cela mérite une pensée.
Ce corbillard était fort utile pour convoyer à l'église puis au cimetière les décédés des vilalges : un long voyage depuis la Jarge ou Courtane, par exemple.
Avant l'achat de corbillard, une charette ou un tombereau faisait l'affaire.
A Pioussay, le premier corbillard aurait pu être abrité dans cette grange sise face au portail de l'église (à gauche sur ce cliché) comme il le fut un temps vers 1970.
Toutefois en 1902, on avait décidé de construire un abri plus réduit engagé dans l'enceinte du cimetière.
La remise assiste au passage du défilé lors de la fête à Pioussay en 1962.
Remise pour loger le corbillard
Le 31 juillet 1902, vu l'avis du conseil municipal, le maire Eugène Beguier demande au préfet l'autorisation de traiter de gré à gré avec les ouvriers du pays. Pour construire une remise pour le corbillard, à l'angle sud-ouest du cimetière.
"4,90 m sur 3,90 m, dimensions extérieures, pierre de taille de la localité, le reste en moellons hourdis à mortier de chaux hydraulique et terre franche, toit à deux pans, ardoises d'Angers. Porte ménagée dans la façade, de 3 m de hauteur, 2,70 m de largeur. Portail de sapin rouge.
Coût total : 760 francs."
Un bâtiment tout beau.
26 novembre 1933
Il faut un conducteur pour le corbillard
Conseil municipal de Pioussay : il serait nécessaire d'avoir une personne chargée de la conduite du corbillard pour le transport des corps. Un crédit de 300 francs est ouvert à cet effet pour 1933, il sera procédé à une adjudication le 10 janvier 1934.
Un cahier des charges est établi (transport des personnes décédées dans la commune et hors commune (maxi 10 kms)).
« L'entrepreneur devra se munir du permis d'inhumer... être tous les jours à la disposition des familles des décédés... le corps des personnes décédés sera transporté individuellement dans le corbillard communal, attelé d'un cheval garni de harnais en bon état. L'entrepreneur devra être rendu à la maison mortuaire 10 minutes avant l'heure fixée pour la levée du corps. Le conducteur ne conduira jamais son char autrement qu'au pas.»
Durée du contrat : 3 ans. Deux soumissionnaires cultivateurs à Pioussay : Eléonor Gatineau et Julien Georges. C'est ce dernier qui remporte l'adjudication le 1er mars 1934 (7 pour cent de rabais contre 4 pour cent à son rival). Marché renouvelé en décembre 1937 à Julien Georges, seul soumissionnaire.
Le dernier voyage
On dit du cheval de corbillard qu'il a « un mors aux dents et au cul »,
Le corbillard (histoire générale)
Autrefois on donnait ce nom au coche d'eau qui menait à Corbeil près Paris. Par quelle capricieuse transformation le nom d'un coche d'eau est-il devenu celui d'un char funèbre? Peut-être est-ce à cause de la lenteur de la marche, la seule analogie que nous puissions trouver entre ces deux véhicules.
On appelait aussi corbillards les carrosses dans lesquels étaient entassés les gens de la suite des princes; puis on a fini par appeler ironiquement corbillard toute voiture chargée d'un nombre de personnes qui n'était pas en rapport avec sa capacité.
Quoi qu'il en soit de cette étymologie, le nom de corbillard était spécialement donné aux chars funèbres, richement décorés, qui transportaient les restes mortels des grands à leur dernière demeure.
Aujourd'hui (en 1850), à Paris, le plus mince bourgeois se donne les honneurs du corbillard, qui sont en province le privilège exclusif de l'aristocratie, de la noblesse et de l'opulence.
Un corbillard ne diffère d'un coche que par trois objets.
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1. Il n'a plus de mantelets ou rideaux ;
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2. le plafond est dans les corbillards communs remplacé par des barreaux de bois placés à distance égale, et transversalement : cette disposition se remarque plus rarement dans les riches corbillards ;
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3. les sièges sont supprimés, et un peu avant les deux extrémités de la voiture, on pose deux traverses épaisses destinées à supporter le cercueil.
Ces voitures ont ordinairement environ six pieds cinq pouces de longueur, sur trois pieds neuf pouces de large, pris à l'endroit de la ceinture: elles ont cinq pieds quatre pouces de haut à partir du dessous de la voiture à l'impériale : deux pieds deux pouces de hauteur d'accotoir : deux pieds neuf pouces d'entrée ou de largeur de portière, quelquefois deux pieds, deux à trois pouces seulement.
Elles sont toujours peintes en noir, garnies de draperies de même couleur, et disposées pour deux chevaux. Comme l'attelage ne va jamais qu'au pas, et que d'ailleurs il est plus que suffisant, on se dispense de donner des soins à la légèreté de ces voitures.
Achat d'un corbillard (3 décembre 1921)
Marcelin Suraud, maire de Bernac (16) et Jean Jouinot, maire de Saint-Martin du Clocher, (16) achètent (1) à Eugène Blais, entrepreneur de Pompes funèbres à Ruffec, un corbillard et les communes en deviennent co-propriétaires.
Il s’agit d’un « corbillard et de ses accessoires, le tout ayant fait un certain usage et comprend : un char placé sur quatre roues, surmonté de quatre colonnes supportant elles-mêmes un dais et sur lesquelles - un à chaque coin - pendent quatre pompons à plumets noirs - un à chaque angle extérieur et supérieur - et quatre figures en métal blanc ; une petite draperie noire de 0,30 m de largeur environ, aux franges argentées qui épouse le pourtour latéral du dais ; 3e, quatre cordons blancs avec poignée, dits cordons du poêle ; 4e, un drap noir avec raie blanche, un drap blanc crème. Et une paire de traits d’attelage en cuir et des guides également en cuir.
La présente vente aura effet au 1er janvier 1922, les communes remettront le corbillard et ses accessoires à l’adjudicataire du transport des corps des deux communes. Cette vente est consentie moyennant la somme de 1.300 francs.
Fait à Bernac le 3 décembre 1921.
Validé par le sous-préfet de Ruffec le 7 décembre 1921.
(1) Délibération du conseil municipal de Bernac du 13 novembre 1921 et de Saint-Martin du Clocher du 20 novembre 1921