Contrat de mariage
de Rolland Charles de Martel
et Céleste Thérèse Elisabeth de la Maisonneuve

1er mai 1783
Mariage Martel et de Venours
Par devant les notaires à Poitiers soussignés furent présent René Rolland de Martel de Villeneuve, Marie Anne de Laurent son épouse qu’il autorise, stipulant pour Rolland Charles de Martel leur fils majeur, officier de cavalerie, demeurant tout en cette ville Paroisse de Saint Michel d’une part ;
Pierre Jérôme Fursi de la Maisonneuve de Venours, Elisabeth Dupin son épouse qu’il autorise, stipulant pour Céleste Elisabeth de la Maisonneuve leur fille mineure, présente, établie de son consentement, ce qu’ils autorisent demeurant au dit Poitiers, rue des Feuillants, paroisse Saint Cybard, entre lesquels parties ont été faits les traités clauses et conventions de mariage qui suivent, savoir que le dit sieur de Martel fils et la dite demoiselle de Venours de leur consentement des autorités de leurs pères et mères des avis et consentements de leurs parents et amis assemblés ont promis se prendre à mari femme et légitime époux lorsqu’ils en seront l’un par l’autre requis ou par leurs dits parents et amis en face de l’église catholique et les cérémonies observées, avec tout et chacun leurs biens et droits pour demeure commune entre eux le dit jour de la bénédiction nuptiale, conformément à la coutume de cette province de Poitou, sous les lois de laquelle ils entendent contracter encore qu’ils eussent des biens ou qu’il vint à leur en échoir dans des coutumes où les dispositions seraient contraires y renonçant. [----] ne seront tenus des dettes et hypothèques l’un de l’autre créées avant le dit futur mariage qui seront payées et acquittées par celui qui les aura contractées et sur ses biens sans que ceux de l’autre en soient tenus.
En considération duquel futur mariage les dits Sieur et Dame de Martel dotent le dit Sieur leur fils d’une somme de soixante quatorze mille livres en attendant leur future succession moitié par moitié chaque côté néanmoins solidairement entre eux, en paiement de laquelle somme ils lui cèdent abandonnent et délaissent dès maintenant et à toujours la propriété et jouissance de la terre de Villeneuve ses appartenances et dépendances sans réserve située en la paroisse de Pioussay en Angoumois avec les gros bestiaux, charrues, charrettes, fûts vinaires de toutes espèces, exceptés les meubles meublants, six jeunes veaux et vingt moutons que les Sieur et Dame de Martel père et mère se réservent, cependant accordent au Sieur futur époux la jouissance de ceux des dits meubles qu’ils voudront laisser dont sera fait état entre les parties pour par le Sieur futur époux les représenter à toutes réquisitions la dite terre de Villeneuve rapportable ou précomptable par le futur époux venant aux successions des Sieur et Dame ses père et mère eu égard aux droits de chacun des Sieurs et Dame de Martel père et mère dans la dite terre, comme aussi les Sieurs et Dame de Martel réservent les fruits et denrées des années précédentes qu’ils ont sur la dite terre et qu’ils pourront enlever à leur commodité, sur laquelle terre étant dû à la Demoiselle de Martel sa tante, quatre mille livres qu’elle a prêtées par acte de constitution par notaire lors de l’acquisition qui en a été faite, le futur époux en sera tenu et en garantira ses père et mère, [-----] de plus acquittera à la Demoiselle Nicolas soixante quinze livres de rentes au principal du denier vingt (1), que doivent aussi par acte par notaire les Sieur et Dame de Martel, et au Sieur Chabot le jeune une somme de cinq cents livres lesquels deux derniers articles ils ont emprunté pour les besoins du dit futur époux lequel sera tenu de les payer en garantira ses père et mère à peine de droit.
Comme la terre de Villeneuve se trouve acquise en plus grande partie des deniers du dit Sieur de Martel père, pour lui tenir lieu de propre, et que si la dite Dame son épouse venait à décéder la première il se trouverait réduit à un revenu modique, la dite Dame de Laurent son épouse déclare que pour indemniser le dit Sieur son mari de ce qu’il acquitte de son bien la dote promise par eux deux et par moitié, elle donne et assure par ces présentes au dit Sieur son mari pour l’amitié et la considération qu’elle a pour lui deux mille livres de rente perpétuelle qui lui seront payées en cas qu’il survive la dite Dame son épouse, par ses enfants et héritiers de ses biens et sur iceux par hypothèque spéciale sur les terres de Beloeil et le petit marais en Anjou et sur les rentes de Saint Quentin, laquelle donation le dit Sieur de Martel accepte, sans préjudice de ses autres biens et droits et de sa moitié des acquêts meubles et effets de la communauté d’entre lui et la Dame son épouse et de la validité de toutes autres dispositions permises entre conjoints la dite Dame de Martel se dessaisissant de la dite rente de deux mille livres et en saisissant le sieur son mari pour par lui en jouir faire et disposer, la cas arrivant, comme de choses lui appartenant.
Les dits Sieur et dame de Venours de leur part déclarent doter la Demoiselle de Venours leur fille de la rente annuelle de quinze cents livres exempte de vingtième et autres impositions venues et à venir, payable par demi année de six mois en six mois après le jour de la bénédiction nuptiale, à prendre sur leurs plus clairs revenus par hypothèque de ce jour, spécialement sur la terre de Ve ours et ses dépendances située paroisse de Rouillé près Lusignan en Poitou, laquelle terre ils s’interdisent la liberté de vendre et d’en disposer, de façon que la future épouse la trouvera dans la succession du dit Sieur de Venours lui en assurant dès ce jour la propriété, se réservant cependant le dit Sieur de Venours la liberté de vendre couper ou autrement disposer des bois futaies qui sont sur la dite terre et dépendances ainsi et quand il le jugera à propos, et a présentement payé à la future épouse une somme de mille livres en espèces au cours de ce jour que le dit futur époux a prise et reçue dont quittance. Convenu cependant que les futurs à marier seront libres de demeurer dans la maison des Sieur et Dame de Venours où ils seront et leurs enfants logés nourris et chauffés ainsi que leurs domestiques et chevaux, auquel cas d’option les Sieurs et Dame de Venours retiendront sur la rente ci-dessus, la somme de douze cents livres, dont ils se contentent pour toute pension et paieront seulement à leur fille future épouse les trois cents livres restant annuellement. Et si par quelques événements imprévus ou par la volonté respectives de quelques unes des parties, les futurs à marier viennent à se retirer de la maison des Sieurs et Dame de Venours la dite rente de quinze cents livres commencera à avoir couru du jour de leur sortie, bien entendu que l’entretien et gages des domestiques des futurs à marier seront à leur charge.
En cas de prédécès du Sieur de Venours avant la Dame son épouse, il est convenu et stipulé qu’elle jouira de sa maison de la Bretonnière et qu’elle aura pour tout douaire (2) reprise et remploi (3) quinze cents livres de rente viagère sur les plus clairs revenus des biens du Sieur de Venours quitte de toutes dettes et rentes, même celle de quinze cents livres promise et assurée au dits futurs époux laquelle rente demeurera confuse en eux sans pouvoir rien exiger de la Dame de Venours leur mère et belle mère, laquelle aura aussi une fois payée une somme de mille livres pour tous ses droits dans le mobilier de la communauté d’entre elle et le dit Sieur son mari, laquelle clause formera un règlement de droit irrévocable, toutes les parties s’y soumettant [------] pour fonder la communauté ci-devant contractée entre les futurs époux, ils y conféreront de chacun leurs biens et droits une somme de douze cents livres, et le surplus de leurs dits biens et droits, avec ce qui pourra leur échoir de succession directe collatérale donation ou autrement leur sera censé et réputé propre, à eux aux leurs et héritiers de leur côté et ligne pour n’en pouvoir disposer que comme bien de cette nature. Arrivant dissolution de la dite communauté par mort ou autrement, il sera au choix de la future épouse des sieurs et héritiers de son côté et ligne, de l’accepter ou d’y renoncer, en cas de renonciation, elle ou eux, auront et reprendront tout ce qui sera justifié qu’elle y aura porté et lui sera échu de succession directe, collatérale, donation, ou autrement le tout franc et quitte de toutes dettes et charges de la dite communauté, encore qu’elle y fut obligée ou condamnée dont elle les sieurs héritiers de son côté et ligne seront garantis et indemnisés par le dit futur époux, les sieurs, héritiers par hypothèque de ce jour. [-----] A l’égard des habits, armes, équipages et chevaux du dit futur époux, bagues et joyaux de la future épouse, ces articles n’entreront point dans la dite future communauté, ils se les réservent pour en jouir, user , faire et disposer ainsi qu’ils aviseront.
En cas d’aliénation de quelques héritages propres aux futurs époux pendant le dit mariage remploi en sera fait sur la dite communauté, et si elle ne suffit pas à l’égard de la future à marier seulement, sur les propres du dit futur époux et sera l’action de remploi, censée de même nature de propre que les choses aliénées, tant pour disposer que pour succéder.
Où douaire aura lieu, la future épouse l’aura sur les biens du dit futur époux y sujet conformément à la dite coutume de Poitou et autres coutumes où ils se trouveront situés, renonçant expressément au mi-douaire où il aurait lieu, aura aussi la future épouse sa chambre garnie, et habit de deuil pour elle et ses domestiques ou la somme de quinze cents livres pour le tout à son choix à prendre sur la communauté et en cas de renonciation sur les biens du futur époux.
A ce était présente et est intervenue Thérèse Alix de la Maisonneuve fille majeure demeurant en cette ville paroisse Saint Hilaire de la Celle, grande tante et marraine de la future épouse. Laquelle en faveur et considération du dit futur mariage a donné et donne à la dite Céleste Elisabeth de la Maisonneuve de Venours, par donation entre vifs et irrévocable, préciput et avantage et dans la meilleure forme que donation puisse être et valoir la dite de Venours sous l’autorité du dit de Venours son père et lui conjointement avec elle stipulant et acceptant pour le profit d’elle et des sieurs le fonds et propriété de la maison des Roches et ses dépendances sans réserve située paroisse de Quinçay près cette ville, avec les meubles bestiaux et effets qui la garnissent aussi sans réserve, le tout de valeur de vingt mille livres à commencer par percevoir les prix de ferme aux échéances des fruits de l’année mil sept cent quatre vingt quatre seulement, à l’effet de quoi elle s’est dessaisie de la propriété de la dite maison des Roches et dépendances en a vêtu et saisi la dite demoiselle de Venours et les Sieurs dès ce jour et à perpétuité pour en disposer ainsi qu’elle avisera dont elle lui remettra incessamment les titres et papiers, déclarant la dite Demoiselle de la Maisonneuve qu’elle a touché par avance le prix de ferme de la dite maison des Roches qui a pour objet les fruits de la présente année mil sept cent quatre vingt trois, ce par convention expresse, il est arrêté que les futurs époux entretiendront le bail courant de la dite maison des Roches jusqu’à son expiration, ou s’ils l’interrompent, garantiront de tout évènement à cet égard, la demoiselle de la Maisonneuve.
Et si pour quelques évènements imprévus les héritiers de la Demoiselle de la Maisonneuve venaient à contester à la Demoiselle de Venours, sa petite nièce, la donation ci-dessus, la dite Demoiselle de la Maisonneuve déclare qu’elle donne aussi par donation entre vifs et toujours en considération du dit futur mariage, à la Demoiselle de Venours ce acceptante sous l’autorité du dit Sieur son père, une somme de vingt mille livres à prendre sur les plus clairs effets mobiliers de sa succession, acquêts et autres biens de sa dite succession à échoir, bien entendu que ceux de ses héritiers qui ne contesteront pas la donation de la maison des Roches, ne souffriront aucune diminution sur leur portion du mobilier et acquêt dans sa dite succession.
Et pour faire insinuer (4) et registrer ces présentes où besoin sera, les parties ont fait et constitué pour leur procureur le porteur auquel ils donnent tout pouvoir.
Tout ce que dessus les dites parties ont voulu, consenti, stipulé et accepté, à ce faire et accomplir ont obligé et hypothéqué tout et chacun leurs biens présents et futurs les Sieur et Dame de Martel et les Sieur et Dame de Venours solidairement chacun à leur égard, un chacun d’eux l’un pour l’autre, un seul pour le tout, sous les renonciations au bénéfice de division ordre de droit, discussions, évictions de biens que nous dits notaires leur avons donnés à entendre être tels que de deux ou plusieurs obligés pour une même chose, un seul ne peut être contraint pour le tout, s’il n’a renoncé aux dits droits qu’ils ont dit bien savoir, y ont renoncé et renoncent. Dont jugé fait et passé au dit Poitiers en la demeure des Sieurs et Dame de Venours avant midi, le premier jour de mai mil septembre cent quatre vingt trois, lu et ont signé.
La minute est signée des parties, des parents et amis et de nous dits notaires soussignés, demeurés à Bourbeau l’un de nous, et contrôlé à Poitiers le dix du dit mois reçu deux cent quarante sept livres dix sols, insinuée pour les avantages stipulé reçu quatre cent cinquante livres, renvoyé au centième denier (5) à la situation de la terre de Villeneuve, plus reçu quatre livres dix sols pour le contrôle du billet de cinq cents livres. Signé Bontem
Onze mots rayés … La présente expédition délivrée à la citoyenne de Venours de Martel le 18 prairial an 3e de la république après y avoir été supprimé les expressions prohibées par le décret de l’assemblée nationale du 8 pluviôse de la deuxième année de la république f(ranç)aise une et indivisible (Signé Bourbeau)

Notes
  1. denier vingt : l’intérêt d’une somme, placer un capital au denier vingt équivaut à la placer à 5% (rapport d’un denier pour vingt engagés)
  2. douaire : bien assuré par le mari à sa femme survivante
  3. remploi : acquisition faite par un époux à titre personnel grâce à des deniers provenant de la vente d’un bien lui appartenant en propre
  4. insinuation : inscription d’un acte sur un registre autorisé afin d’empêcher les fraudes
  5. centième denier : impôt royal établi en France en 1703 sur les mutations immobilières. A chaque mutation de propriété, en dehors des successions en ligne directe et de certaines donations, il faut verser une taxe représentant le centième de la valeur du bien.
Transcrit par Gérard Boursier.



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