Lait, beurre et fromage


Faire son beurre
Le Poitou, la Saintonge, l’Angoumois importent surtout leur beurre de Bretagne.
« On fait un commerce considérable de beurre1, on en exporte chaque année du port de Morlaix pour une valeur de 1.300.000 fr. (…) Le beurre de Bretagne a depuis longtemps une réputation faite selon la « Revue des deux mondes »…


« De la vache beurrière. La bonne vache laitière est rarement bonne beurrière. Tirez un peu de lait dans la main ou dans un vase. Si le lait est clair et bleuâtre sur les bords, la vache n’est pas beurrière. Mais elle le sera si le lait est épais et d’un blanc jaunâtre. La vache a-t-elle le palais et la langue noirs ? C est un bon signe ! Mais s’ils sont blancs, ne vous y fiez pas. Sont-ils tachetés de noir et de blanc, la vache beurrera médiocrement. Un très petit nombre a le carreau. Talez cette peau qui tombe entre les jambes de devant de la vache, s’il y a au bas une dureté, c’est le carreau, marque certaine d’une bonne beurrière. Je vous avertis que les maquignons soufflent le remeil des vaches et le remplissent d’air pour qu’il paraisse plus gros. Prenez le remeil, trayez la vache pour découvrir la fraude. J. Bujault »


Baratte à beurre.

« Il y a dans nos campagnes deux manières de fabriquer le beurre2. Dans le Bocage et une grande partie de la Plaine, l’on sépare la crème des autres éléments du lait par une chaleur artificielle. Par ce procédé le lait n’est point décomposé, et la partie caséeuse reste toujours suspendue dans le fluide séreux. Dans cet état, les habitants de la campagne l’emploient à faire de la soupe qui n’a pas besoin d’autre assaisonnement, ou à faire des bouillies de mil et de blé noir dont les habitants du Bocage consomment une grande quantité, mais aussi le beurre se trouve mélangé d’une quantité de matière caséeuse beaucoup plus grande que par la séparation spontanée de la crème, et il rancit plus promptement. Lorsqu il est frais et qu’il a été bien battu et bien lavé, il a un goût de crème que plusieurs personnes trouvent agréable. (…)

Dans le Marais et dans les parties de la Plaine qui y sont contiguës, la séparation de la crème se fait spontanément. Le lait s’aigrit et se décompose, et le résidu, lorsque la crème est enlevée, sert de nourriture aux cochons. Le beurre fabriqué par ce procédé est meilleur et se garde mieux.
Dans la Plaine et le Marais, il se fabrique une petite quantité de mauvais fromages qui sont tous consommés dans le pays. »


Le beurre "Charentes-Poitou" fut le premier beurre d'AOC (Appellation d'origine contrôlée) français (1979). 
Il est fabriqué dans des laiteries des quatre départements de la région. On peut aussi le rencontrer sous l'appellation : "beurre des charentes" ou "beurre des Deux-Sèvres".

Le beurre produit par la laiterie d'Echiré, dans les Deux-Sèvres, bénéficie lui aussi d'une AOC. De loin avec le beurre de Pamplie le meilleur...


Echiré beurre de tradition du goût

Pamplie le beurre des chefs
 


Tout un fromage

« Quant au fromage,3 on a ensuite examiné deux fromages fabriqués d’après la méthode du curé de Fouras par M. Sauzeau. Leur goût bien supérieur à ceux fabriqués jusqu’à présent dans le département, pourra dispenser d’en acheter au loin. Leur fabrication rendra plus précieux le lait de vache dont on n’avait su jusqu’à présent tirer d’autre produit que le beurre. »
Visiblement, le beurre et le fromage produits dans les Deux-Sèvres, c’était encore « du vrai travail d’amateur ». La renommée du beurre des Charentes et du Poitou restait à faire.

L’arrivée des Vendéens
Vendéens et Nord-Deux-Sévriens ont laissé leur empreinte à Loubillé. Ils ont pris la place des enfants du pays « montés » à Paris, écoeurés par la crise du phylloxéra, ou déjà riches et voués à des carrières plus valorisantes. Dès 1900, les Vendéens et Nord-Deux-Sévriens sont arrivés à Loubillé et les environs, en Charente et en Charente-Maritime, pour prendre en main des métairies (lire l’annexe n° 9 sur le bail à moitié ou à titre de colonage partiaire en opposition à l’annexe 8). Chez eux, la main d’œuvre était trop nombreuse, il n’y avait que des places de domestiques. La propriété foncière était exclusivement entre les mains des anciens nobles.
Ils ont répondu avec emphase à l’appel des curés qui voulaient redonner du lustre à la religion catholique en ces pays où se fréquente peu l’église. Les premiers ont invité les suivants, cela jusque dans les années cinquante. Ils sont partis à pied jusqu’à la gare, les « affaires » juchées sur une charrette. Ils se retrouvaient aux foires de Couture-d’Argenson le 7, chaque mois, donnaient des nouvelles, se renseignaient sur des métairies disponibles. La guerre de 1914-1918 va voir leurs noms en grand nombre gravés sur les monuments aux morts de la région. Peu à peu, ils s’intègrent, arrachent les ceps de vigne, développent l’élevage laitier et font leur beurre.
En 1950, à Paizay-Naudouin, un amusant bambin disait avec conviction : « Chez nous, y’a plus de Vendéens que de Français. » Désormais, on ne différencie personne, c’est vrai que les foires de Couture se sont éteintes, que les mariages « mixtes » ont fait s’évaporer les origines. Les enfants ne savent parfois pas dire d’où vient leur famille, et ne sont jamais allés au pays…

Les laiteries coopératives
« Nos lecteurs connaissent tous la réputation des beurres du Poitou4. L'article qui suit leur apprendra à la suite de quel désastre agricole, dû au phylloxéra, une organisation de plus en plus puissante, basée sur la coopération des petits cultivateurs, a pu rendre à ces régions une prospérité qu'on croyait perdue pour toujours. (…) Après les désastres phylloxériques, les laiteries coopératives ont sauvé la Saintonge de la ruine. Il y a un demi-siècle, cette région était pleine de prospérité. Sa richesse reposait sur un splendide vignoble que cultivait une population laborieuse et aisée, habituée depuis longtemps à la vie facile des contrées dont la terre généreuse produit, sans relâche, des récoltes rémunératrices. Après l'apparition du phylloxéra, l'agonie du vignoble lui porta un coup terrible. (…) Comme le terrain était pauvre en eau et ne convenait guère aux prairies naturelles, on créa des prairies artificielles et on s'adonna, petit à petit, à l'élevage.
Les paysans demandèrent à l'idée coopérative la solution des difficultés auxquelles ils étaient en butte. Unis dans le malheur et dans la ruine, ils unirent leurs efforts pour la transformation et la vente du lait provenant de leur bétail. Ainsi fut créée, à Chaillé en 1888, par 60 sociétaires, la première laiterie coopérative en vue de la transformation du lait en beurre. Fondée avec des ressources modestes, elle acheta les instruments utilisés dans les beurreries étrangères qui approvisionnaient le marché de Paris (écrémeuses, barattes, malaxeurs, etc.) et qui lui permirent de fabriquer un beurre très apprécié.
Il n'en fallut pas davantage pour susciter un véritable épanouissement des idées d'association qui, débordant la Saintonge, gagnèrent les Deux-Sèvres, la Vendée et certaines parties de la Vienne… »



La laiterie coopérative de Chef-Boutonne
L'élevage bovin et caprin et la production laitière prirent tout naturellement le relais de la viticulture. La réputation des fromages des Deux-Sèvres ne tarda pas à se faire connaître, entre autres grâce aux spécialités à base de lait de chèvre. Les méthodes de fabrication était essentiellement fermières pour la plupart des artisans fromagers.

A Chef-Boutonne, les agriculteurs du secteur étaient invités dès 1901 à faire partie de la laiterie coopérative. Des statuts furent établis :
« Article. II. Cette association a pour but la fabrication du beurre en commun, par les moyens les plus perfectionnés, afin d’en obtenir des prix plus élevés. »
Selon l’article IV des statuts, « la durée de la société est de dix ans à partir du 1er octobre 1900 ». Le nombre des sociétaires est illimité, toutefois peuvent seules faire partie de la société, les personnes habitant dans les communes de Crézières, La Bataille, Aubigné, Loubigné, Loubillé, Hanc, Bouin, Pioussay, Melleran, les Alleuds, Gournay, Loizé , Ardilleux et Chef-Boutonne, etc.
Au titre V, le règlement se veut très précis sur l’hygiène à observer :
Art Ier, le lait devra être placé dans des vases très propres, débarrassé de toutes impuretés provenant de la traite. (…)
Art II, il devra être conservé dans une pièce absolument propre à l’abri de toute odeur. (…)
Art III, le lait du matin ne devra pas être mélangé à celui du soir. »
Un contrôle laitier sera instauré.
Art VI, les échantillons seront pris en présence de deux témoins et en trois fioles ; l’une d’elles sera remise au sociétaire, l’autre à la gendarmerie de Chef-Boutonne, la troisième restera à la société pour être analysée.

Livret "Statuts" 1903 : http://gastronomeruffec.wifeo.com/documents/laiterie-chef-boutonne-1903-statuts.pdf

Les statuts5 étaient réédités en 1925 pour la septième fois. Mais en 1936, la société d’assurance contre la mortalité du bétail est purement communale.






 
La laiterie de Villefagnan

Cliquer sur ce lien :

http://gastronomeruffec.wifeo.com/laiterie-villefagnan.php
 
Une laiterie à Ruffec/Condac, au Moulin Enchanté, en 1909

Cliquer sur ce lien et descendre dans la page :
http://gastronomeruffec.wifeo.com/les-moulins-de-condac.php

 

La fin de la laiterie de Chef-Boutonne : c'est glac...

Fromages de Fontenille, 5 agriculteurs refusent l'industriellisation de leur produit, c'est tout dit : http://www.intervalexport.com/fichiers/presFRAfontenille.pdf

Et puis maintenant c'est tout bio : http://www.pleinchamp.com/elevage/ovins-caprins/actualites/elevage-bio-la-cooperative-laitiere-de-la-sevre-encourage-ses-producteurs-a-se-convertir


La fin (probable) de la laiterie de Bougon, c'est qui ?
   

Origine de la laiterie de Civray - Saint-Saviol (86)

Maire de Saint-Saviol de 1898 à 1925, Eugène Mady est aussi le fondateur de la laiterie coopérative, à Creuillère.
 



Le 8 janvier 1911, les sociétaires de la coopérative laitière étaient convoqués en réunion générale afin de choisir un emplacement pour la construction du bâtiment où seront installées les machines.



20 mars 1911, M. Mady est maire, une commission est désignée, suite à la demande
de la laiterie d'une autorisation de pompage de l'eau à la fontaine municipale de Creuillère.
Autorisation accordée ainsi que la pose d'une tuyauterie. La laiterie devra également
installer un puisard d'eau pour le public, un lavoir de 4m sur 8m, et en retrait un abreuvoir
pour le bétail.


4 février 1912, la mairie de Saint-Saviol fait une demande auprès des services de la poste pour que le télégraphe puisse être installé. La laiterie... qui va fonctionner dans une quinzaine de jours s'étend sur 20 kms...

29 février 1912, la laiterie collecte sur 16 communes. La mairie trouve injuste de
payer l'installation du télégraphe qui profite à des étrangers à la commune. Discussions
engagées entre la préfecture, la poste et la mairie.

13 avril 1912, accords pour la pose du télégraphe.

8 février 1914, le conseil municipal de Saint-Saviol demande à la laiterie de réparer
le lavoir de Creuillère étant donné qu'elle a touché une subvention pour un branchement de son réseau en eau.

31 mai 1914, la commune engage les travaux au lavoir, la laiterie lui reversera la
subvention retenue pour ces travaux. Après paiement la mairie constate une dépense
supérieure à la subvention versée.
Extraits délibérations receuillis par Phillipe Montazeau que nous remrcions.


Il y aura des déçus : http://www.tecnal.fr/upload/Realisation%202007%20TECNAL%20%C3%A0%20St%20Saviol%20Groupe%20Glac.pdf



La laiterie de Saint-Saviol le 30 septembre 2012.
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Les unions laitières en Poitou-Charentes : http://pro.terredeschevres.fr/IMG/pdf/Historique_Janv09.pdf
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Tout un fromage : http://www.unfromage.com/archives/2010/11/11/18389089.html

Un produit à l'étiquette : http://www.letyrosemiophile.com/departements/Deux-Sevres.htm


Les laiteries de la Charente : http://www.letyrosemiophile.com/departements/Charente.htm
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1 Mémoire de l’académie d'agriculture de France, 1850.
2 Mémoires de l’académie d'agriculture de France, 1818.
3 Mémoires de la Société de statistique du département des Deux-Sèvres, 1843.
4 Le moniteur des professions rurales, n°6 du 5 octobre 1923, page 19.
5 Collection particulière de Patrick Ricard.
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