De l'eau à l'électricité

Benjamin Franklin invente le paratonnerre en 1760, Volta invente la pile en 1799, Sir  Humphrey Day invente la lampe à arc électrique en 1813, le français Gaston Planté met au point en 1859 une pile réversible ou accumulateur, la première batterie de l'histoire. En 1868, le Belge Zénobe Gramme réalise la première dynamo. Thomas Edison met au point la lampe à incandescence en 1879 et une centrale hydraulique de 7 kW est construite à Saint-Moritz.
Le premier réseau électrique, en 1882, alimente 400 lampes dans un premier temps et jusqu'à
10.000 dès l'année suivante. En 1883, Lucien Gaulard et John Dixon Gibbs créent la première
ligne électrique. La première collision nucléaire eut lieu en 1919…

L'électricité se développe progressivement durant le XXe siècle, dans l'industrie, puis l'éclairage public et le chemin de fer avant d'entrer dans les foyers.
Différents moyens de production de l'électricité se développeront dans l'histoire : centrales hydraulique, thermique, éolienne, puis nucléaire, enfin les éoliennes, le photovoltaïque...
Entre les deux, on a plus ou moins tout essayé : le moulin à vent ou le moulin à eau entraînant une génératrice entre autres exemples.
Un « visionnaire » avait au début des années Vingt eu l’idée de créer un barrage sur l’Amazone. On aurait pu y construire d’immenses centrales électriques qui auraient permis de charger des bateaux piles, chargés de transporter de l’électricité…

La fin des becs de gaz ?
1905, le maire de Villefagnan, le docteur Claude Brothier veut remplacer l’antique système
d’éclairage public à becs de gaz par un réseau de lampadaires électriques. A défaut de réseau
fournissant l’énergie électrique, il serait mis en place une station municipale composée d’une
génératrice entraînée par un moteur à pétrole.


Mais l’idée n’a pas conquis le préfet de la Charente, peu éclairé sans doute, qui préféra couper le disjoncteur des initiatives du maire.
On continuera à éclairer les rues avec la flamme produit par du gaz - du gaz qui sentait le fumier comme les rues boueuses de Villefagnan.
Pas de rivière en pays villefagnanais, donc pas de barrages. Le moteur à pétrole semblait une bonne solution pour entraîner un outil à la poulie. Mais la machine à vapeur, qui offrait plus de puissance, avait ses souteneurs. Elle s’imposa peu à peu dans les conserveries de Ruffec, ou au sein des sociétés agricoles pour entraîner les batteuses.

A partir de 1899, des réseaux électriques urbains se construisirent à Niort, Melle, Airvault, Breloux, La Crèche, La Mothe-Saint-Héray…

Un heureux présage
Avril 1910, dans le Journal de Ruffec, on parle de l’arrivée de l’électricité. «Nous sommes heureux d’apprendre à nos lecteurs… qu’une ligne venant de l’Isle-Jourdain passera par Civray, et qu’un branchement, venant de Civray à Ruffec, sera installé immédiatement.
Il paraît que les organisateurs de cette intéressante affaire seraient en pourparlers avec le
concessionnaire du gaz de Ruffec, pour que la lumière électrique et le courant pour moteurs nous soient fournis. Espérons qu’une solution avantageuse interviendra prochainement. La société de gaz ne perdrait rien à sa fourniture habituelle ; car le gaz n’est pas employé généralement pour éclairer les chambres à coucher, les salles à manger, et le salons ; tandis que l’électricité se prête bien à ce genre d’éclairage. Donc, bonne chance à l’électricité de l’Isle-Jourdain.
Le soir, chacun pourra allumer et éteindre sa lampe facilement. Le jour, les caves, les endroits sombres pourront être éclairés au moindre désir. Chacun pourra avoir son moteur électrique : imprimeurs, tourneurs, charrons, serruriers, mécaniciens, boulangers, même les ouvrières, pour leurs machines à coudre. Acceptons cet heureux présage, et espérons sa réalisation prochaine.
"

La guerre met les projets en veilleuse
Les années passent mais rien n’évolue, la lumière
électrique reste quasi absente du Ruffécois. Aucun barrage, aucune station électrique ne
s’installe sur la Vienne, notamment au niveau de l’Isle-Jourdain. La guerre annihile les initiatives. Pourtant : la Société des Forces Motrices de la Vienne (centrales hydrauliques) avait été créée en 1914.

Retour à la paix
Enfin, voilà 1918, la guerre se termine, les projets peuvent refleurir. Du côté de l’Isle-Jourdain la Vienne se voit dotée progressivement de trois barrages : et trois usines hydroélectriques. Le Ruffécois va bientôt s’illuminer.

L'usine du barrage de Jousseau au fond de la retenue (30 sept. 2012).
 






Pont routier, château et viaduc le 30 septembre 2012.
 
Née limousine sur le plateau de Millevaches, à près de 1.000 m, la Vienne a déjà parcouru 200 km lorsqu'elle rentre dans le département à Availles-Limouzine. Cette partie du parcours traverse une vallée parfois encaissée qui a permis l'installation de trois barrages hydroélectriques à Millac et à l'Isle Jourdain. Ils ont modifié l'aspect de la rivière jusqu'à la transformer en larges lacs. Le lac de Chardes est dominé par un superbe viaduc.


Le barrage de la Roche (Millac)
Cette centrale hydroélectrique (chute de 8 m) est construite à partir de 1918 et mise en service en 1921 pour la Société des forces motrices de la Vienne d'après un avant-projet de Le Corbusier, architecte conseil de la SABA, Société d'Application du Béton Armé, par les entrepreneurs J. et G. Hersent.


 
Le barrage de Jousseau (Millac)
La centrale hydroélectrique de Jousseau est construite entre 1926 et 1928 par la Société des
forces motrices de la Vienne. Chute de 9 m. Cette usine fait partie du groupement de La Roche qui compte 5 centrales sur la Vienne.

 
Le barrage de Chardes (l'Isle-Jourdain)
Cette centrale hydroélectrique est construite en 1926 pour la Société des forces motrices de la
Vienne. Barrage de 14 m de haut pour une chute de 10,5 m. Une centrale thermique de secours ou d'appoint en période d'étiage a cessé de fonctionner dans les années 1960, et fut démolie.






Tout arrive
L’Union Electrique Régionale, société constituée à Ruffec le 1er avril 1922 fut mandatée pour établir à Saint-Saviol un poste de transformation à 60.000 volts. Le directeur est M. E. Couanon ; M. Raison (Banque Raison à Ruffec) est président du conseil d’administration. La société qui bénéficie d’une concession de 50 ans de la part de l’Etat reçoit l’aide de ce dernier, sans lequel le projet ne serait pas réalisable.


Les travaux débutent en juillet 1922 et se terminent le 10 novembre suivant. Ce poste sera
le premier modèle du genre en France. Sa puissance était de 300 KW soit quelques 400 CV. De là, part l’électricité qui alimente Civray, Ruffec et son canton, Villefagnan et son canton, Tusson, Sauzé-Vaussais, etc.

Le 1er août, cette société devient propriétaire du Service de la distribution de l’eau et du gaz de Ruffec.
«Dès le 10 novembre 1922, soit 3 mois et 10 jours après la création de la société, les villes de Civray et Ruffec commencent à être alimentées en énergie électrique. La ville de Sauzé-Vaussais l’était depuis le 15 décembre 1921 (1) et Courcôme depuis le 25 février 1923. Dans quelques jours, ce sera le tour de Raix, de Villefagnan et de Chef-Boutonne» lit-on dans L’observateur de Ruffec du 25 mars 1923.
(1) Etonnant mais c'est écrit dans ce journal.


Le mardi 24 avril 1923, en séance au conseil général, le maire de Sauzé-Vaussais, M. ALLAIN propose une résolution concernant l’électrification rurale au nom des conseillers généraux de l’arrondissement de Melle. Il assure : «L’électrification ne peut se faire que par le groupement des usagers en coopératives, sociétés à intérêts collectifs ou syndicats de communes» Source : Séolis SIEDS Energies.

En 1923 le conseil général des Deux-Sèvres crée le syndicat intercommunal d’électricité des Deux-Sèvres (SIEDS).

Il fallait déterminer par qui l’exploitation du réseau serait assurée. "Dès Juin 1926, une importante crise économique se développa à la suite de fortes tensions financières sur le marché des changes, risquant de bouleverser à la fois les prix intérieurs et l’aide de l’Etat aux collectivités publiques. Cette situation ne permettait pas au S.I.E.D.S. de traiter dans des conditions rationnelles avec d’éventuels concessionnaires privés. L’exploitation des réseaux en Régie résulte donc de cette crise et c’est le 6 octobre 1926 qu’une Régie provisoire voit le jour. Le 28 avril 1927, était signé l’arrêté préfectoral «autorisant le SIEDS. à poursuivre, en tant que de besoin, l’exploitation en régie de la distribution de l’énergie électrique sur son territoire, aux conditions du cahier des charges approuvé le 6 octobre 1926 et conforme aux dispositions du décret du 8 octobre 1917». Source : Séolis SIEDS Energies.

"En 1946, la loi de nationalisation des entreprises privées de distribution électrique aboutit à la création d’EDF. Les établissements sous statut public comme la Régie du SIEDS sont maintenus en l’état. Cela explique que certaines communes sont desservies à la fois par la Régie du SIEDS (périphéries) et EDF (centres bourgs). Source : Séolis SIEDS Energies.

Le SIEDS distribue aujourd'hui l'électricité à Pioussay.

ERDF est le gestionnaire du réseau.

Enchainement historique.




L'exemple de Raix en Charente, une commune éclairée
Raix sera l’une des toutes premières communes du district de Ruffec à bénéficier de l’électricité (110 Volts monophasé).
Raix bénéficie d’une opportunité exceptionnelle lorsque Ruffec, Courcôme et Villefagnan furent
raccordés au réseau électrique. Une ligne à 15.000 volts, dont les poteaux sont en bois, vient de Ruffec en passant par Courcôme et traverse Raix avant de rejoindre Villefagnan. Un transformateur est installé. Dès 1923, les habitants qui le souhaitent peuvent être raccordés rapidement au réseau, dont la tension délivrée est transformée en 110 volts.
Le 26 janvier 1924, l’entreprise R. Soufron de Ruffec facture l’installation de l’électricité à la
mairie, dans la salle de classe, dans le logement de l’institutrice pour un total de 311 francs.
La pose du compteur électrique à la mairie et le raccordement au réseau sont ensuite facturés par l’Union Electrique Régionale 90 francs à la commune le 17 mars 1924.
La municipalité de Raix est désireuse de faire connaître son avant-gardisme et ses mérites. Elle s’empresse de faire installer d’urgence un éclairage public sommaire. Aussi, la nuit, les passagers empruntant la ligne de chemin de fer de l’Etat (dite ligne de Ruffec à Niort), sont émerveillés de tant de progrès et du modernisme de cette petite commune.
Le 31 mars 1924, l’Union Electrique Régionale facture 97,50 francs de consommation d’électricité (éclairage des rues) pour la période du 15 février au 31 mars. Le contrat annuel est établi sur la base de 780 francs.
La fête doit être accompagnée. Le téléphone existe depuis longtemps dans la commune grâce à la halte du train, relayé ensuite par celui du maire.
Afin que chaque citoyen puisse bénéficier de « l’ouillette magique », le conseil municipal a
pris, le 8 septembre 1921, la décision de faire la demande d’une cabine téléphonique publique.
Les premiers postes radiophoniques apparurent vers 1924. Certains de ces appareils ont dû faire l’objet de saisie par les Allemands dans les temps noirs de 1941 à 1944.
 
Enterrons les réseaux
Les élus se sont empressés de faire installer des câbles électriques dans les rues des
bourgs et villages.
Aujourd’hui, ils se battent pour trouver des budgets en vue de les faire effacer.
Personne ne semble s’en plaindre, même pas les hirondelles.




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