Point n'est besoin d'un fusil pour chasser. Le Pioussayen n'a jamais manqué d'idées. A l'instar de ses voisins régionaux, il a multiplié les initiatives.
La chasse aux foujhets (à Pioussay 79) et aux foujhats à Brettes (16)
Ce ne sera pas la peine d'interroger les académiciens, ils n'ont jamais chassé le foujhet ou foughat, et resteront bec cloué devant ce terme. Deux chenapans, Alain Damy et René Gallais lèvent le voile sur cette spécialité pratiquée à Brettes comme à Pioussay.
Locale car chasser le foujhat, c'est chasser le moineau. C'est vrai que les maisons de la commune regorgent souvent de trous en haut de façade pour piéger ces oiseaux, trous triangulaires faciles à repérer et taillés dans le moellon, surtout à Villairet et Marsillé. D'autres, scellaient dans le mur deux tuiles posées l'une sur l'autre de façon à former un canal.
La chasse aux foujhats permettait aux agriculteurs de réduire dans les vignes et les champs le nombre de ces prédateurs.
Des gerbiers à La Place...
Battages chez les Morin à La Place en 1948 : les gerbes en maillées (gerbiers).
Après battage, la paille était entassée en paillers.
«Elle se pratiquait autour des paillers avec un bâton et une lampe à carbure» raconte Alain Damy. Les moineaux se cachaient sous le débord de paille de la couverture du pailler. «Les gars y allaient à deux, poursuit le Brettois que l'on rencontre souvent chaussé de charentaises, l'un tenait la lampe braquée vers les oiseaux, qui, aveuglés, restaient figés ; l'autre malin en profitait pour leur asséner un coup de bâton.»
Couic ! Mais l'affaire n'est pas terminée. Les moineaux étaient plumés, vidés sans doute, puis nichés dans une grosse pomme de terre évidée et refermée. L'aventure se poursuivait dans la braise jusqu'à parfaite cuisson. Parfois, celle-ci se faisait sur la forge du grand-père Raoul Damy. C'était un délice.
D'autres prenaient des moineaux de la même façon, grâce au carbure qu'ils achetaient chez le forgeron. « Nous les fricassions dans la poêle à la maison » se souvient quant à lui René Gallais.
Un oiseau migrateur et protégé...
Couper la queue du cheval pour faire une siasse au poil
Encore un terme absent du dictionnaire, mais pas de la mémoire des Brettois. Ne surtout pas associer à ce mot une situation critique. Non, la siasse c'est autre chose, c'est brettois et c'est des alentours, tout simplement.
Il faut expliquer que les maréchaux-ferrants coupaient la queue des juments pour l'hygiène et faciliter l'acte... puis la naissance des poulains ; on coupait également celle des chevaux quand on n'aimait pas se prendre des coups de queue. On dit un cheval écourté, une jument écourtée.
Enfant à Brettes (16), Alain Damy «donnait la main» à son père qui pratiquait souvent cette «opération» torride. L'animal était «anesthésié» par l'action d'un tord-nez qui lui serrait la babine. «Je maintenais le tord-nez serré en tournant le manche, relate le cow-boy brettois, la queue de l'animal était attachée à une ficelle et maintenue haute par le propriétaire, mon père se saisissait de son coupe-queue et visait la jointure entre le 2e et 3e os. Et crac. Un jet de sang puissant inondait les curieux qui se tenaient trop près. Mon père sautait alors sur son brûle-queue, un gros anneau porté au rouge très vif sur la forge pour l'appliquer sur la plaie, autour de l'os. Ce chirurgien rural cautérisait ainsi la plaie dans la fumée qui puait le poil et la viande grillés. Surpris par la douleur, l'animal ruait, je serrais encore plus le tord-nez. Gare à moi s'il s'était défait... Un peu de grésil sur la chair brulée et l'opération était terminée.»
Belle réserve de siasses sur cet étalon poitevin de l'élevage Bernard à Taizé-Aizie (16).
Et la siasse ?
Point n'est besoin d'un permis de... chasse pour chasser à la siasse. Histoire du permis de chasse, d'un clic !
Toutes ces queues de cheval finissaient alignées en trophée dans l'atelier. Certaines servaient à «émoucher» (1) les chevaux et les bœufs pendant le ferrage. Avec les meilleurs poils, les plus longs que l'on tressait, on faisait un fil très solide. «A un bout on faisait un noeud coulant.» Et voilà, la siasse était prête à... faire feu ! Enfin, à piéger les moineaux à l'entrée des trous de «chafaud» (trous carrés ou se logeait les supports horizontaux des échafaudages).
La suite de l'histoire est identique à celle de la chasse au «foujhat» : une pomme de terre et... Chasse "en vain"...
Chez Gallais, René fabriquait ses siasses en arrachant un poil à la queue du cheval. Avec, il piégeait les pinsons et les alouettes. « En vain » dit-il. Ces siasses étaient attachées à une ficelle. Il se souvient surtout des poules prises au piège ce qui provoquait la colère de sa mère... «De toutes façons, dit-il, pour le goût et satisfaire sa faim, mieux vaut manger une grive qu'un moineau. » Il conserve cet avis depuis déjà 65 ans.
Des affaires de chasse, O lé pas nouvia ! 26 novembre 1706 (pour l'exemple) Plainte au Lieutenant-Criminel d’Angoumois par Jean MAURIN, fermier du lieu de la Follye, appartenant à M. Jean SOUCHET, Lieutenant-Criminel au présent siège.
Disant que ce jourdhuy, environ une heure de relevée, les sieurs de LARTIGE fils, La CHAPELLE MARON, les sieurs de la PILLE (VIGIER) père et fils, et le valet du sieur de LARTIGE et autres, seraient venus sous le prétexte de chasse à deux ou trois fois dans la cour dudit lieu de la Follye, paroisse de Trois-Palis, étant armés de fusils et pistolets, ce qui n’est point l’équipage de chasseurs à l’oiseau.
Ayant poussé une perdry jusque dans la cour dudit sieur des DOUSSETS, lesdits sieurs de LARTIGE, la CHAPELLE MARON, les sieurs de la PILLE VIGIER père et fils, y étant entré pour la première fois auraient maltraité à coup de fouet Simon MAURIN, fils du suppléant , à cause qu’il voulait empêcher que ledit oiseau ne se jetât sur des pigeons francs qui étaient dans ladite cour.
Et lesdits MAURIN ayant pris ladite perdry qui était cachée sous des orties, l’aurait remise honnêtement audit sieur de LARTIGE, lequel l’ayant reçue fort brusquement aurait encore donné de son fouet sur les doigts dudit Simon MAURIN et serait sorti avec ceux de sa compagnie de la basse-cour dudit lieu de la Follye.
Et peu de temps après, lesdits sieurs de LARTIGE et autres rodant toujours dans les domaines dudit lieu, seraient revenus repasser dans ladite basse-cour et autour dicelle et ledit sieur de LARTIGE étant à cheval aurait tiré un coup de pistolet du dehors de la basse-cour et au dessus du mur, sur ledit MAURIN qui était dans icelle cour sous une loge à faire des sabots, duquel coup il serait tombé par terre et serait décédé de sa blessure une demi-heure après.
Et incontinent après le coup tiré, lesdits sieurs de LARTIGE, la CHAPELLE MARON, lesdits sieurs (de la PILLE) VIGIER père et fils, et autres auraient pris la fuite.
Et le vaslet dudit sieur de LARTIGE aurait été pris à la clameur publique et conduit par des archers aux prisons d’Angoulême.
Il y eut le garde chasse et le garde-champêtre
Le garde-champêtre de son ancien nom "Messor" puis "Messier". De nos jours, qui se souvient pas de ce personnage bien souvent haut en couleur et maintenant disparu de bon nombre de nos communes ?
Il était officier de police judiciaire, chargé de surveiller les récoltes, les propriétés rurales de toutes espèces et de constater les délits qui pouvaient s'y commettre, ainsi que les contraventions aux règlements de la police municipale.
Avant la Révolution de 1789, les terres nobles, celles tenues en fief, indépendamment de la barrière infranchissable que le droit exclusif de chasse élevait au profit des seigneurs, entre leurs domaines et les terres du simple habitant des campagnes, avaient leurs gardes particuliers.
Les terres roturières et les propriétés communales n'avaient généralement, pour les protéger contre le maraudage et les déprédations de toute nature, que la vigilance presque toujours impuissante de leurs possesseurs eux-mêmes.
Il y avait une police pour les villes, mais aucune pour les campagnes.
Les premières appellations du garde champêtre sont : Messor, messilier, messium cusios, messaer, messarius, mésségué, tous ces noms signifient «messier», de «messis», «moisson» celui qui garde les moissons ; on retrouve le nom de «messier» depuis le haut moyen âge jusqu'au début du XXe siècle.
Le messier a pour mission de surveiller les moissons, il officie sur des juridictions seigneuriales et est l'ancêtre d'une longue lignée de gardes ruraux qui deviendront quelques siècles plus tard les gardes champêtres d'aujourd'hui
Suivant la loi du 6 octobre 1791, pour être garde-champêtre, il fallait avoir 25 ans révolus, être d'une moralité irréprochable, posséder la fermeté du caractère et les connaissances premières requises pour rédiger convenablement un rapport. Nous verrons plus loin que certains de nos gardes-champêtres ont pourtant fait quelques entorses à ces conditions ! Un arrêté gouvernemental du 25 fructidor an IX (12 septembre 1801) prescrivait de choisir les gardes-champêtres parmi les vétérans et autres anciens militaires.
Avant d'entrer en fonction, le garde-champêtre devait prêter le serment professionnel devant le juge de paix, seul compétent pour le recevoir. La loi du 31 août 1830 le remplaçait par un serment politique qui était aboli par le décret du 1er mars 1848, puis rétabli par la Constitution de 1852, et de nouveau aboli par un décret du 5 septembre 1870.
Toujours suivant la loi du 6 octobre 1791, il devait être muni, dans l'exercice de ses fonctions, d'une plaque de métal ou d'étoffe où étaient inscrits ces mots : La Loi, le nom de la municipalité et le sien. Le port des armes était facultatif et leur acquisition restait à la charge de la commune.
En plus des rôles d'officier de police judiciaire et d'agent de la force publique, le garde-champêtre était aussi agent de l'administration municipale dont il devait faire exécuter les règlements et instructions.
Tous les anciens s’en souviennent et pour cause, tout le monde le connaissait et l’appelait familièrement par son prénom. C’était en quelque sorte, une des personnalités du village, en bon rang après le maire, le curé, l’instituteur et les conseillers municipaux. Il faut reconnaître que c’était l’homme de l’information «officielle», administrative et communale, celui par qui toute nouvelle transitait, dans un sens comme dans l’autre. Il était pour ainsi dire le trait d’union entre les édiles et les administrés du village.
Dès fois, il devait affronter les rouspéteurs inconditionnels, pour des choses même futiles... Il savait tout, il connaissait tout le monde. Pendant sa ronde qui le faisait s’arrêter aux différents points stratégiques de la commune, il apportait dans chaque rue et dans chaque maison, information, consigne et ordre.
Il était coiffé d’un képi qui lui conférait l’autorité communale.
Avis à la population ... !